Sang-Froid: Un conte de loups-garous
Pour débuter une série de rencontres portant sur le jeu vidéo québécois et canadien, le laboratoire universitaire de documentation et d’observation vidéoludiques (LUDOV) de l’université de Montréal a reçu Yan Pepin, président d’Artifice Studio et co-créateur du jeu d’action et stratégie Sang-Froid : Un conte de loups-garous (Sang-Froid: Tales of Werewolves). Le jeune entrepreneur aux multiples casquettes est revenu sur son expérience autour des différentes étapes de création du second jeu indépendant canadien le plus vendu de l’histoire lors de sa sortie. En dépit d’un contexte de production difficile, on peut dire que les créateurs du jeu ont réussi à conserver leur sang-froid et à diffuser des thèmes, des images et des histoires de la culture québécoise à l’international.
« Le jeu s’est fait dans ma cuisine, ma blonde se levait et voyait 3 gars qui pitonnaient sur la table. »
Le contexte de développement dans le domaine du jeu vidéo au Canada a beaucoup évolué ces dernières années, principalement dû au FMC – Fond des Médias du Canada – une institution publique vers laquelle se tournent de nombreux studios afin de soumettre leurs projets dans le but d’obtenir une subvention.
Cette aide financière, Yan Pepin et son équipe n’ont pu l’obtenir, en raison d’une méconnaissance du jury vis-à-vis de la scène vidéoludique lorsque le projet a débuté en 2009. L’écosystème du FMC s’est nettement amélioré, et depuis, lorsqu’un projet en jeu vidéo est soumis à l’étude, le jury est composé de spécialistes qui sont à même de juger de la faisabilité et la viabilité du projet.
Alors que l’aboutissement du jeu ne devait pas prendre plus de deux années à temps partiel, l’équipe de créateurs a travaillé pendant plus de quatre années à temps plein.
« Ne plus être au service de ceux qui ont l’argent […] pour retrouver l’excitation que l’on avait quand on jouait. »
« On ne faisait pas un jeu pour monsieur et madame tout le monde, on faisait un jeu pour qui jouer à un jeu faisait partie du sens de la vie. »
« On ne sait jamais où s'arrête le réel et où commence la fiction [...] Un pied dans le réel et un pied dans l'imaginaire, les deux se nourrissent. »
Sans être hermétiques aux néophytes, les mécaniques du jeu s’adressent particulièrement à un public féru à cause de leur quantité et de leur complexité. Yan Pepin rappelle à plusieurs reprises qu’ils ont réalisé un jeu à leur image, un jeu auquel ils auraient envie de jouer.
Ce faisant, pour le processus de création l’équipe a adopté une approche de Game Design communément appelée Top-down. Pour ce type d’approche, les mécaniques de jeu sont au service d’un concept, dans ce cas-ci un univers et une histoire, afin de les rendre palpables, plus réels.
L’histoire de Sang Froid co-écrite avec l’écrivain Bryan Perro donne vie à de multiples personnages qui évoluent dans un village du Québec au 19ième siècle. Yan Pepin est un passionné de contes et légendes, et pour cette raison il a souhaité que l’univers de Sang-Froid,comme celui des contes traditionnels québécois, emprunte aux codes de la fiction et du fantastique tout en intégrant des éléments issus de recherches historiques pour donner de la crédibilité à l’univers. Un alcool qui a réellement existé au Québec au cours de l’époque dans laquelle se déroule les événements de Sang-Froid permet de nourrir l’imaginaire des joueurs. L’utilisation du folklore québécois, au-delà de nourrir ses aspirations personnelles, permet de parler de l’identité d’un peuple.
« Les folklores se parlent entre eux, c'est encore plus beau, c'est l'une des grandes joies qu'on a eu concernant les retours de l'étranger. »
L’intégralité de la rencontre filmée est disponible sur la chaîne Youtube du LUDOV.
Compte rendu rédigé par Arnaud Guillard, étudiant à la maîtrise en cinéma, option études du jeu vidéo.